Denim et chambray, destins croisés

Denim et chambray, destins croisés

6 min de lecture

Au royaume des tissus mythiques, le denim et le chambray sont rois. Pour Hast, dont la quête des matières les plus nobles perdure depuis 2012, ces deux étoffes comptent parmi les plus riches qui soient. Souvent amalgamées du fait de leur allure, elles ont pourtant des histoires et des caractéristiques propres. Aujourd’hui, nous vous proposons un article en forme d’hommage, à la gloire de ces armures imperméables au passage du temps.

 

 

Des origines communes

 

Avec toutes les précautions qui s’imposent, il nous paraît raisonnable de voir dans le chambray et le denim deux descendants de la « futaine » médiévale. Au Moyen ge, cette étoffe de type toile ou sergé mobilise généralement une chaîne de coton et une trame de lin, laine ou soie. Du reste, c’est précisément ce qui distinguera par la suite les deux tissus iconiques auxquels nous nous intéressons.

Avant d’aller plus loin, un petit rappel d’ordre technique s’impose.

Pour fabriquer un tissu, il faut entrecroiser des fils horizontaux (trame) et verticaux (chaîne). Pour ce faire, trois grandes techniques cohabitent, lesquelles lui offrent des propriétés différentes :

  • l’armure toile consiste en un entrecroisement régulier des fils. Le fil de trame passe alternativement sur puis sous un fil de chaîne (et réciproquement), ce qui donne un tissu d’aspect harmonieux, identique sur l’envers et sur l’endroit. Il s’agit de l’armure la plus simple et la plus ancienne.
  • l’armure sergé est plus inégale puisqu’elle affiche des côtes obliques. Ces diagonales sont dues à une méthode de tissage particulière, où la trame passe sous un fil de chaîne puis sur plusieurs autres. Cette armure apporte, de facto, davantage de texture et de relief.
  • l’armure satin, de son côté, est plus complexe et moins répandue sur le marché. Ici, les points de croisement entre chaîne et trame sont répartis plus ou moins aléatoirement, jusqu’à devenir imperceptibles. L’objectif attendu est celui d’une surface lisse et plane, souvent soyeuse au recto et mate au verso.

Crédits : Louise Magazine

 

 

En association avec la matière première et le diamètre des fils utilisés, ces différentes techniques ont une influence sur l’ouverture, la densité, la souplesse et la résistance du tissu.

Pour en revenir au chambray et au denim, telle est la différence fondamentale entre ces deux étoffes si fréquemment confondues : le premier est une toile tandis que le second est une serge.

 

La formidable histoire du chambray

 

 

Tirant son nom de la commune française de Cambrai (dans nos actuels Hauts-de-France) où il fût inventé au cours du 16ème siècle, le chambray est une armure toile historiquement tissée avec des fils de lin. Fine et luxueuse, la « batiste » - pour l’appeler par son nom d’époque - sert déjà à fabriquer des chemises, mais aussi des sous-vêtements. Au siècle suivant, l’empire britannique importe massivement du coton indien, matériau plus doux et moins onéreux. Travaillé en coton, le « scotch chambric » d’outre-Manche concurrence alors le « French cambric » tout de lin vêtu. Trop cher, le second disparaîtra peu à peu et laissera à son homologue anglais le monopole du chambray. Aux États-Unis, ce tissu léger et robuste séduit rapidement les paysans et la classe ouvrière. Ouvragée avec une chaîne indigo et une trame écrue, sa couleur bleutée inspirera le terme de « cols bleus » pour désigner les travailleurs manuels, par opposition aux cols blancs. Au fil du temps, le chambray escortera ainsi les cow-boys, les marins de l’US Navy, les vedettes du cinéma et les amoureux de belles matières.

 

L’incroyable voyage du denim

 

 

Plus récent sans être de première jeunesse, le denim est un tissu sergé dont l’origine anime fréquemment les débats. Certains l'associent à la « serge de Nîmes », étoffe travaillée en laine et soie dans le Languedoc au 18ème siècle, et dont l’appellation déformée aurait donné « denim ». D’autres voient plutôt une filiation remontant aux grandes heures de l’export italien. Avant que l’Empire britannique n’inonde le marché de coton indien, c’est en effet le port de Gênes qui fournissait les principales cités européennes en futaines de coton, laine et lin mélangés. Dans les registres du port de Londres, une déformation du nom de cette ville ligurienne aurait ainsi offert à l’histoire le mot « jean ». Le denim, quant à lui, serait une émanation de ces futaines de Gênes, travaillées en serge de coton dans un souci d’économie et de diversification. Comme chacun sait, c’est aux États-Unis que le denim connaîtra ensuite son heure de gloire : dès l'implantation de l'industrie du coton à la fin du 18ème siècle, le denim fait partie des premiers tissus fabriqués à grande échelle. L’idée de teindre la chaîne à l’indigo pour lui offrir sa célèbre teinte bleue, couplée aux différentes innovations d’un certain Levi Strauss, parachèveront son entrée au panthéon des tissus légendaires.

 

Hast et l’interprétation de matières complémentaires

 

Fréquemment confondus, le chambray et le denim ont en effet nombre de points communs : inventés en Europe occidentale, ils ont traversé les siècles (et l’Atlantique) avant de conquérir le monde grâce à des propriétés uniques, une polyvalence absolue, une texture singulière et une couleur reconnaissable entre mille.

Pourtant, leurs différences parlent d’elles-mêmes et en font des tissus plus complémentaires que semblables. De fait, le denim est une serge consistante et rustique, davantage adaptée aux pantalons, vestes et chemises épaisses. De son côté, la finesse et la souplesse du chambray s’épanouit beaucoup mieux sur une chemise.

Capitalisant sur leurs caractéristiques respectives, nous avons évidemment pris soin de solliciter ces matières dans les registres adéquats en pensant nos collections. Par suite, vous retrouverez sur nos portants :

  • des chemises en denim : d’abord utilisé pour la fabrication de pantalons de travail, le denim a pris de la hauteur pour apporter sa science aux pièces de buste. Indéboulonnables et résolument workwear, nos chemises en denim fleurent bon le Grand Ouest, la liberté, la tradition et l’authenticité. Tissés en Italie à partir de fils d’une grande finesse, vous aurez loisir de choisir votre délavage préféré parmi nos modèles brut, foncé, clair ou col officier. À l’occasion de notre 10ème anniversaire, nous avons même imaginé un modèle en édition limitée, hommage à peine voilé aux désormais célèbres « western shirt » des garçons vachers nord-américains. Avec ses empiècements aux épaules, ses deux poches poitrine et ses boutons pression, elle donnerait presque envie de flâner avec un brin d’herbe au coin des lèvres, ou de s’offrir une paire de santiags.
  • des chemises en chambray : composées d’un fil de trame blanc et d’un fil de chaîne souvent teint, nos chemises en chambray sont immédiatement reconnaissables à leur texture souple et onctueuse. Tissées dans une armure toile, elles sont identiques sur l’endroit et sur l’envers, avec cette couleur bleue subtilement chinée. Légères et pleines de caractère, elles conjuguent texture et uniformité comme aucune autre. Chez Hast, nous vous la proposons en bleu clair et en bleu foncé, mais aussi dans un registre workwear plus prononcé, lestée de ses historiques poches plaquées.

 

À votre tour de dompter ces tissus mythiques

 

 

De prime abord, apprivoiser des étoffes vieilles d’un demi-millénaire peut être assez intimidant. Pourtant, vous verrez rapidement qu’elles ne demandent qu’à sublimer la moindre de vos tenues, et ce quel qu’en soit le registre. Vous vous en doutez probablement, ce n’est pas pour rien si elles ont séduit presque tous les corps de métier sur tous les continents ces cinq derniers siècles : du clergé aux militaires en passant par les chercheurs d’or, les ouvriers, les cow-boys, les artisans, les artistes ou les designers, leur polyvalence n’est plus à démontrer.

Le denim et le chambray sont comme ça : ils se portent de la tête aux pieds, ensemble ou séparément, dans un total look ou pour créer la rupture dans une tenue habillée, à la Gainsbourg… ou à la Hast.

 

 

Et maintenant, c’est à vous de jouer.

Articles qui pourrait vous intéresser